rouge garance


LA PETITE HISTOIRE

Le village de Louvry, situé un peu au sud de Guise, dans le département de l'Aisne, a connu des jours heureux à la fin du XIXème siècle. En 1882 et 1883, un petit groupe d'enfants a animé le village de leurs rires et de leurs jeux. Ces enfants, habitants du village ou cousins de ces derniers venus passer l'été, ont échangé mille serments, connu leurs premiers émois amoureux, ri à en perdre haleine. Puis, cet instant magique est passé, et chacun a poursuivi sa route.

En ce mois d'août 1914, la guerre s'invite chez tous les français. Apolline Vanuxem, habitant à nouveau Louvry en compagnie de son père après de longues années à Paris, reçoit un courrier de son cousin Léon. Ce dernier est chassé de sa ville de Valenciennes par l'avancée des allemands. Les journaux se contentent de reproduire les paroles réconfortantes du président Poincaré, et les français sont encore persuadés que leur armée va balayer l'ennemi comme un fêtu de paille et reprendre en quelques semaines leurs terres volées en 1870. La réalité est toute autre. Les allemands, appliquant le plan Schlieffen, ont balayé en quelques jours la Belgique, et s'enfoncent à travers le territoire français à un rythme effrenné.

Apolline propose à son cousin de l'héberger le temps nécessaire à la stabilisation de la situation. Ce faisant, elle repense à ces merveilleux étés, à ses anciens amis et cousins dont la plupart ne se sont pas revus depuis. Voulant chasser la morosité ambiante, elle projette d'inviter toute la bande à passer un week-end chez elle, comme au bon vieux temps.

Malgré la guerre, tous, ou presque, vont faire le voyage. Deux d'entre eux ayant été appelés sous les drapeaux, leur venue est incertaine, mais tous les autres ont, de manière surprenante, répondu présent. Plus de trente années ont passé depuis ces fameux étés, et la vie s'est écoulée de manière plus ou moins chaotique pour chacun des amis. Le foisonnement artistique, intellectuel, scientifique ou politique de la Belle Époque a bouleversé la vie de tous. L'esprit de joie qui animait ces enfants existe-t-il encore?

Ce 29 août, tout le monde fait route vers Louvry, ignorant le danger qui les guette. En effet, omnubilée par la paranoïa de l'espionnage et conservant une vision aristocratique de la guerre, les dirigeants militaires, Joffre en tête, n'informent personne de l'évolution des combats. Le "brillant" plan XVII, fierté de l'Etat-Major français, est largement battu en brêche par l'ennemi. L'"Elan Vital" supposé des armées tricolores, sensé repousser l'adversaire par la force brute et l'esprit combatif issus d'une juste cause, ne résiste pas aux méthodes modernes de guerre des allemands. Ce 29 août, l'ennemi est aux portes de Guise, prêt à franchir l'Oise. Lorsque les invités arrivent à Louvry, on entend le bruit des canons qui résonnent au loin.

Apolline reçoit les invités au moment du thé, et chacun se remémore les années écoulées depuis l'enfance. Les souvenirs sont échangés, les nouvelles vies décrites avec emphase ou avec pudeur. L'inquiétude sourde liée aux combats fait peser une ambiance étrange sur l'assemblée. Ou bien, serait-ce autre chose?


LA GRANDE HISTOIRE

Les premières années du XXème siècle voient l'Europe, particulièrement la France, sous l'emprise d'extrêmes tensions nationales. La défaite de 1871 précipite la fin du second empire, et la troisième république est instaurée en 1875. La " paix armée " règne. Depuis la perte de l'Alsace-Lorraine, la France vit dans une situation d'isolement diplomatique jusque vers 1890. À cette date, elle se défait du filet bismarckien visant à l'isoler et parvient à créer des alliances concrètes avec le Royaume-Uni et la Russie. Pour se défendre, les élites adoptent des politiques nationales contenant des éléments qui finissent par les diviser, minant du coup l'État français. Tout cela s'exerce sous la menace constante d'un conflit armé entre la France et l'Allemagne. La réapparition du danger allemand depuis 1905 est accompagnée aussi du relent de la question des provinces perdues que sont l'Alsace et la Lorraine. Bien que les divisions politiques affaiblissent le gouvernement français, il y a cependant un certain consensus entre les nationalistes de gauche et de droite qui veulent tous profondément récupérer ces territoires perdus depuis 1871.

Durant tout le XIXème siècle, la France s'est constituée un vaste territoire colonial. La plus grande partie de l'Afrique de l'Ouest, Madagascar, l'Indochine sont propriétés de la France en 1900. De nombreuses expéditions scientifiques sont envoyées dans ces lointains pays et l'industrie française bénéficie des ressources puisées au loin.

La Belle Époque, qui désigne la période entre 1879 et 1914, représente un foisonnement intellectuel, scientifique et artistique rare. De nombreuses idéologies politiques (l'anarchisme, le socialisme, le radicalisme, le pacifisme, le patriotisme et le nationalisme) irriguent la vie publique, des expériences sociales transforment la vie de la population (par exemple le familistère de Guise), des découvertes scientifiques majeures changent le monde (maîtrise de l'électricité, développement de la voiture et de l'aviation, découverte de la radioactivité), des courants artistiques majeurs fleurissent (mouvements picturaux, art nouveau, théâtre, littérature, musique). Le cinéma et la photographie sont également inventés à cette époque.

Les expositions universelles de 1889 (présentation de la tour Eiffel) et de 1900 (électricité : Paris, ville lumière !) représentent les symboles phares de la Belle Époque.

L’affaire Dreyfus a durablement marqué les esprits, tant par son hostilité que son intensité, et malgré la grâce présidentielle dont a joui le militaire en 1901, cette affaire a eu pour conséquence de constituer en France deux blocs antagonistes, sur un fonds religieux.

De 1910 à 1912, l'épisode de la bande à Bonnot illustre le changement de la société de l'époque : des criminels organisés se réclamant d'un courant de l'anarchisme et utilisant des moyens modernes pour accomplir leurs forfaits font la Une des journaux et ridiculisent la police. L'apparition de cette nouvelle criminalité pousse le socialiste Georges Clémenceau, alors président du Conseil, à créer les brigades mobiles.

Le 31 juillet 1914, trois jours avant le début de la guerre, Jean Jaurès, autre socialiste et principal chef de file du camp pacifiste, et propriétaire du journal l'Humanité, est assassiné à Paris, précipitant le ralliement des derniers socialistes au camp de la guerre.

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